Trop mignon !

Automne 2020—Les objets des collections

Pour s’éloigner quelques instants de la morosité ambiante, l’équipe de la conservation du Mucem vous propose une série d’objets ou documents issus des collections du musée propices à un peu de douceur ! 

 


Gobelet à devise


 

Gobelet à devise, Verre émaill,  France, Normandie, 1820-1848 © Mucem

Gobelet à devise, Verre émaill, France, Normandie, 1820-1848 © Mucem

Verre émaillé
France, Normandie
1820-1848
1950.29.8
 
La saison des vœux fait souvent rimer « bonne année » avec « santé », et cette année encore plus que les autres peut-être. Ici, c’est la bonne santé de la bien-aimée de l’auteur de la dédicace qui est célébrée… sur un verre. Un lieu insolite pour une déclaration ?

Pas vraiment en matière d’art populaire où les objets les plus quotidiens peuvent devenir des supports de messages. Ce verre appartient à la famille des verres dits « à devise » en référence aux inscriptions qui les ornent. Celles-ci célèbrent tantôt l’amour, tantôt l’ivresse et le vin, tantôt  à la chose politique. « Vivre pour toujours le plaisir et l’amour », « Point de joie sans toi », « Heureux l’amant aimé de l’objet qu’il a désiré », « Vive ma blonde », mais aussi « Vive le bon vin », « Le vin est mon délice », « Vive le roi », « De la bravoure des soldats la taille ne décide pas »… autant de formules émaillées sur ces verres produits principalement dans l’Ouest de la France au 18e et dans la première moitié du 19e siècle. La forme (gobelet dit « hollandais », évasé en partie supérieure et cannelé en partie inférieure) et le décor (ici de frise de boucles sur la lèvre et d’oiseau coloré entouré de rameaux fleuris) sont caractéristiques de cette production. L’inscription était appliquée sur l’espace laissé libre, selon le souhait de l’acheteur. 

Les collections du Mucem comptent de nombreux présents d’amour, marquant l’attachement du promis à sa promise : bagues, colliers, mais aussi objets usuels, portant parfois une dédicace, comme des passettes à ruban, plioirs à dentelle, quenouilles ou battoirs à linge. Même les objets les plus quotidiens peuvent parfois cacher des preuves d’amour… 
Emilie Girard, Directrice scientifique et des collections

Breloque


 

Breloque, 19e siècle, laiton émaillé © Mucem

Breloque, 19e siècle, laiton émaillé © Mucem

19ème siècle,
Laiton émaillé
1901.1.229

Cette modeste breloque en forme de marguerite fait partie des nombreuses amulettes et bijoux populaires collectionnés par Lionel Bonnemère (1843-1905) et donnés au Musée d’Ethnographie du Trocadéro. Ces objets constituent une importante collection conservée au Mucem et qui pour nombre d’entre eux témoignent des croyances populaires et des pratiques divinatoires dans la France rurale du 19ème siècle. « Effeuiller la marguerite » est en effet un jeu de superstition romantique qui est censé refléter les sentiments de l'être aimé. Qui n’a un jour effeuillé une vraie fleur de marguerite, lui a enlevé les pétales un à un et associé chaque partie de la ritournelle : « elle (il) m'aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, plus que tout, pas du tout » à chacun des pétales détachés. La partie de la phrase associée au dernier pétale est censée refléter les sentiments de la personne à qui elle s'adresse.
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Cet effeuillage populaire et floral est depuis longtemps pratiqué dans plusieurs pays dont la France. Et l’expression prend une tournure nouvelle et plus poussée lorsqu’elle s’entend dans un sens plus physique, effeuiller physiquement la marguerite et donc déshabiller la femme. Mais elle garde tout son romantisme et sa pureté lorsqu’il s’agit simplement de « conter fleurette », de « flirter » ou pourrait-on écrire « fleureter », par attirance pour la métaphore. Car le mot anglais « flirt » tirerait son origine du verbe de l’ancien français « fleureter » ou « conter fleurette ». 
Et l’on ne saurait parler de « fleureter » sans parler de Fleurette, fille d’un jardinier du château de Nérac, en Albret, et premier amour du futur roi Henri IV. Mais le Vert Galant se lassa et laissa une Fleurette éplorée qui, selon la légende, se noya dans la Baïse. Il n’en fut rien, elle mourut en fait une vingtaine d’années plus tard. Mais si d’aventures, vous vous promenez dans le parc de la Garenne à Nérac, vous pourrez voir une statue de la belle Fleurette, presque en face du Pavillon du Bain, charmant petit édifice Renaissance où les dames de la cour d’Albret se déshabillaient avant d’aller se rafraichir dans la Baïse. Au pied de la statue, on peut y lire ces vers « A peine ils s'étaient vus qu'ils s'aimèrent d’amour. Elle comptait 16 ans ; lui, trois de plus. Ravie, Fleurette à cet amour donna toute sa vie. Henri, Prince d’Albret ne lui donna qu’un jour ».  Pour les Néracais, le mot « flirter » tire son origine de là, des amours d’Henri de Navarre et de Fleurette.  
Mais dans cette marguerite en laiton émaillé, nulle divination, nul amour déçu. La breloque s’articule et révèle sur les pétales ce seul message, celui attendu par l’être aimé « Je t’aime de tout mon cœur ».

Françoise Dallemagne, Chargée de collections et de recherches

 


Porte de ruche


 

Porte de ruche, Slovénie, Zog, 1891, Bois peint © MNHN/ photo Mucem

Porte de ruche, Slovénie, Zog, 1891, Bois peint © MNHN/ photo Mucem

Slovénie, Zog
1891
Bois peint
DMH1957.20.44

Les boites de nuit sont fermées… Qu’à cela ne tienne, les animaux s’en accommodent ! Ce panneau peint, daté sur le côté droit de 1891, montre ainsi deux couples d’animaux dansant au son d’une musique jouée par un violoniste (humain) et un joueur de contrebasse (un ours peut-être ?), dans une forêt. Ce décor charmant a été réalisé sur une porte de ruche. 
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Depuis l’apparition de l’apiculture à la période antique, les ruches ont adoptée des formes variées et peuvent être très décorées. Elles sont parfois regroupées en ruchers, installation composées d’étagères sur lesquelles sont disposées différentes ruches et surmontées d’un toit pour les protéger des intempéries, comme les impressionnants ruchers de Haute-Slovénie. Ces constructions de bois abritent une centaine de ruches disposées horizontalement sur plusieurs niveaux. De forme quadrangulaire, chacune est dotée d’une paroi frontale peinte de scènes historiées. Les plus anciens décors de ce type conservés remontent au 18e siècle et montrent alors principalement des motifs religieux. Au 19e siècle, période d’apogée de cet art qui disparait après la Première Guerre mondiale, ils sont progressivement remplacés par des scènes profanes et humoristiques, mettant en scène des chasseurs ou des artisans, des défauts féminins, des scènes guerrières ou, comme ici, des épisodes cocasses montrant des animaux qui « singent » les mœurs humaines. Une autre porte de même provenance conservée dans les collections du Mucem montre un cortège funèbre composé d’animaux portant la dépouille d’un chasseur, présidé par un officiant… ours ! La revanche de la nature en somme. 
Emilie Girard, Directrice scientifique et des collections

Hochet


 

Hochet, Espagne, milieu du 20e siècle, Fer blanc © MNHN/ photo Mucem

Hochet, Espagne, milieu du 20e siècle, Fer blanc © MNHN/ photo Mucem

Espagne, milieu du 20e siècle
Fer blanc
DMH1973.80.42
A l’époque où la communication par sms use et abuse d’émojis (terme qui vient du japonais e – « image » - et moji – « lettre »), comment ne pas percevoir ici un visage souriant, un sorte de smiley en objet ? Le pays inventeur du Kawaï, véritable culture du mignon, nous a ainsi apporté un nouveau mode d’expression, basé sur la reconnaissance immédiate d’émotions à travers des images simples.
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Mais revenons à cet objet. Le sourire dessiné dans la partie basse de la panse de ce hochet est en fait l’ouverture semi-circulaire d’un grelot, permettant au petit élément mobile qui se trouve à l’intérieur de la panse d’émettre son cliquetis. 

La légende veut que le hochet ait été inventé par un disciple de Platon, le savant Archytas de Tarente, inventeur de la poulie, de la vis et de la crécelle, pour amuser ses enfants. Au Moyen-Age, le hochet devient un objet précieux réalisé dans les matériaux les plus nobles et il figure même dans les inventaires des familles princières. Ce n’est qu’à partir du 19e siècle que les hochets se démocratisent. Ils prennent alors bien souvent une forme semblable à celle de notre exemplaire : un petit récipient de fer blanc tenu par un manche et ouvert d’une fente, renfermant un petit morceau de métal, une graine desséchée ou des billes qui permettent de faire tinter l’objet lorsqu’on le secoue. Le petit bruit produit a pour objectif d’éveiller les sens du bébé, en l’occurrence son ouïe, et facilite le développement moteur de l’enfant qui apprend à remuer le hochet pour produire ce cliquetis. 

Les collections du Mucem regorgent d’objets relatifs aux « âges de la vie » et la petite enfance est particulièrement bien représentée : vêtements miniatures, petits bonnets, chaussons douillets, berceaux décorés et jouets variés viennent matérialiser la trace de ce premier âge, ô combien attendrissant. 
Emilie Girard, Directrice scientifique et des collections

 


Chaussons de bébé, laine tricotée et ruban de satin


 

Chaussons de bébé, laine tricotée et ruban de satin, fin du 19e – début du 20e siècle, Mucem © Mucem

Chaussons de bébé, laine tricotée et ruban de satin, fin du 19e – début du 20e siècle, Mucem © Mucem

fin du 19e – début du 20e siècle
1973.107.115.1-2
Au XIXe siècle, aux côtés de la couture, la broderie ou la dentelle, le tricot fait partie des nombreux « travaux d’aiguille » enseignés aux jeunes filles de tous milieux. Traditionnellement employé pour la fabrication des bas et chaussettes, il est également la technique privilégiée pour les trousseaux de naissance – la « layette », dont les pièces doivent avant tout protéger et tenir chaud. Ces chaussons de bébé, produits minutieux d’un savoir-faire alors considéré comme féminin, illustrent la place majeure que le tricot occupe encore dans l’économie domestique au tournant du siècle.

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En plein essor de l’industrialisation, alors que la bonneterie se mécanise et ne cesse de perfectionner ses techniques, le recours au tricotage manuel reste longtemps indispensable pour les milieux ruraux et populaires. En effet, les textiles sont particulièrement coûteux : ils se transmettent, se reprisent, se récupèrent, se détricotent et se tricotent de nouveau, tandis que les plus petits ouvrages permettent d’employer efficacement chutes de rubans et bouts de fils. A noter que les associations culturelles du bleu et du rose respectivement au masculin et au féminin ne seront fermement établies qu’au milieu du XXe siècle : ici, le choix de la couleur, alors que le blanc est alors la norme pour les habits d’enfants, est donc davantage un choix pragmatique que le signe qu’on destinait ces chaussons à une petite fille !
Faciles à démonter, ces chaussons de bébé ont pourtant traversé sans encombre tout le 20e siècle, à l’image des innombrables chaussures d’enfants conservées au Mucem et dans tant de musées en France et à l’étranger. C’est que leurs caractéristiques techniques s’accompagnent d’une charge bien particulière, qui sous-tend toute l’histoire du vêtement d’enfant : conçus avec soin, ils deviennent avec le temps les vestiges d’un âge révolu, les incarnations parmi les plus suggestives et les plus émouvantes de toute une mémoire familiale. 
Coline Zellal, conservatrice du patrimoine

Figurine de décor de gâteau


 

France, vers 1950 Papier, métal, plastique Haut 8,7; diamètre 6,4cm Poids 7,5gr © Mucem

France, vers 1950 Papier, métal, plastique Haut 8,7; diamètre 6,4cm Poids 7,5gr © Mucem

France, vers 1950
Papier, métal, plastique
Haut 8,7; diamètre 6,4cm
Poids 7,5gr
1961 66 33

Ce petit personnage en plastique qui émerge entre des feuilles de papier coloré fait partie des accessoires décoratifs associés à la pâtisserie de fête. La tige de métal permet de ficher l'élément de décor sur un gâteau servi lors d'un baptême, et plus précisément ici pour le baptême d'un petit garçon. Les filles naissent dans des roses et les garçons dans des choux ? C'est ce qu'illustrerait ce petit objet des années 1950, où le bleu est délibérément associé au sexe masculin. Or, pendant longtemps, les vêtements de layette pour les nouveaux nés étaient invariablement blancs, sans teinture, pour permettre un lavage garantissant une hygiène aussi exigeante que possible; d'autant plus que le sexe de l'enfant n'était connu qu'à la naissance, les techniques d'imagerie échographique ne se développant que dans les années 1970. Le blanc, à la fois neutre, mais également associé à la pureté morale de la petite enfance en Europe occidentale, convenait à tout nouveau-né.
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D'ailleurs, au moment du baptême, à la fin du XIXème siècle, il n'était pas rare en France mais aussi en Angleterre, d'associer à la tenue blanche de l'enfant, un ruban rose ou rouge pour les garçons et blanc ou bleu pour les filles. Le développement du culte marial à partir de la deuxième moitié du XIXème siècle dans la tradition catholique, encourage à associer le bleu aux filles pour les placer sous la protection de la Vierge, alors que le rouge conviendrait mieux au tempérament sanguin des garçons ! Le folkloriste Van Gennep rapporte en 1943 en France, que "le rose et le rouge semblent prédominer pour les garçons, le blanc et le bleu, couleurs de la Vierge pour les filles. On m'a dit de divers côtés, que cette tradition populaire semble se conserver dans les maternités et des cliniques de beaucoup de villes françaises et même à Paris." Mais la tendance à l'inversion des couleurs associées à l'un et à l'autre sexe commence dans les années 1930 ; en effet, le bleu/vert étant doté de la qualité de pouvoir repousser le diable et les garçons devant assurer la pérennité du lignage et du nom, ils ont besoin d'être protégés davantage que les filles par le corps social dans la société traditionnelle. Le bleu acquiert progressivement une valeur de robustesse, et le rose, un rouge atténué, une valeur de délicatesse. Le chou et la rose, dont les feuilles ou les pétales s'organisent de manière dense et tournoyante, proposent ainsi une forme symbolique d'où peut émerger, sans risquer quelque danger extérieur, un nouveau principe vivant. 
Le chou aux rudes feuilles bleu ardoise et vert foncé, légume d'hiver qui ne craint pas les gelées, constitue ici la garantie d'une protection pour la figurine d'un nouveau-né qui en émerge. Et puis, placer au sommet d'une pyramide de choux à la crème pâtissière et nappés de caramel, un chou vert et plein de vie, c'est trop chou !
Mireille Jacotin, Conservatrice en chef du patrimoine
 

La conscience du Petit chaperon rouge


 

La conscience du Petit chaperon rouge, H. 43 cm, La. 14 cm © Mucem

La conscience du Petit chaperon rouge, H. 43 cm, La. 14 cm © Mucem

H. 43 cm,
La. 14 cm
1963.177.74 
Les collections du Mucem sont riches de plus de 4500 accessoires de marionnettes. Une grande partie provient du théâtre Jean et Colette Roche, de la compagnie du même nom créée en 1953 à Pantin, au Nord-Est de Paris. C’est le cas de cette marionnette à gaine.

Le palmipède en chemise de nuit n’est pas un doudou d’enfant. Il est trop grand : on peut y passer la main et l’avant-bras. Pattes d’oie et bec en feutrine jaune, corps dodu, blanc, bordé de dentelle, yeux roulés noirs en deux perles cousues qui donnent un air éberlué et innocent ; connaît-on son nom ? Dotée d’une auréole, l’angélique marionnette est un personnage créé pour le théâtre : la Conscience du petit chaperon rouge. Associée à l’enfant, elle dicte la bonne conduite et doit l’orienter dans le droit chemin, du moins, le mettre en garde. Elle rappellerait dans ce rôle le grillon Jiminy Cricket de Pinocchio, autre célèbre pantin. Celui-là est coiffé d’un chapeau haut-de-forme dont le disque, au gré des mésaventures, se détache de la calotte, s’ouvrant en auréole. 
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Revenons au Petit chaperon rouge, paru en 1697 sous la plume de Charles Perrault dans les Contes de ma mère l’Oye. Le recueil est très populaire, notamment dans l’édition illustrée par Gustave Doré, dans la seconde moitié du 19e siècle, qui connaît un grand succès auprès des enfants. La transmission orale du conte est ainsi passée à la postérité littéraire par l’entremise de Perrault, qui a collecté les histoires à moralité populaire. Mais sans citer ses sources. En ce sens, il n’a pas déjà une démarche de folkloriste pédagogiste.

Selon le Dictionnaire de l’Académie française de 1694, « conte de ma mère loye » est une expression courante pour « conte de vieille ». La Mère l’Oye incarnerait aussi une campagnarde, avec du bon sens. Mais il y aurait peut-être méprise, car l’Oye se rapporterait en fait à l’ouïe, l’histoire étant destinée aux oreilles des auditeurs, oyé. La marionnette revêt l’aspect d’une oie, bien connue depuis l’Antiquité pour être une lanceuse d’alerte. Ainsi, les Oies du Capitole ont protégé Rome de l’invasion barbare. Que cacarde notre oiseau de basse-cour, si tant est que l’oie de la bonne conduite n’est pas sauvage. Est-elle prévenante tandis que le loup dans le lit de mère-grand crie de sa grosse voix « Tire la chevillette, la bobinette cherra » ? Cancane-t-elle à l’oreille que, pour les préserver, il n’est pas prudent de rendre visite aux grands-parents par temps de loup rôdant ? Et qu’il est aussi proscrit de muser en chemin ? 
Sa fonction est de rendre audible le conte cruel et cauchemardesque aux enfants spectateurs du théâtre. Dans la version non édulcorée de Perrault, le loup glouton et repu triomphe en une fin atroce. S’il s’est gardé de dévorer le Petit chaperon rouge dans la forêt, c’est par peur des chasseurs alentour. Il fait d’une pierre deux coups en engloutissant tour à tour la mère-grand puis l’enfant. Le récit est une mise en garde, et à l’intérieur de ce dernier, les Roche introduisent une marionnette qui avertit, désignée comme « la conscience du petit chaperon rouge ». Finalement, où est le danger : dehors ou dedans ?
Caroline Chenu, Chargée de collections et de recherches

Album Panini « Guendoline »


 

Album Panini Guendoline, collection Mucem

Album Panini Guendoline, collection Mucem

Impression sur papier
Vers 1989

2007.40.51

Grands yeux ronds et brillants, visage de poupée disproportionné, adorables couettes blondes et délicate robe à tablier rose et blanche : Gwendoline (ou Guendoline) a tout de l’héroïne de shojo manga, un genre de bande dessiné japonaise spécifiquement destinée aux jeunes lectrices. Œuvre phare de la mangaka Yoko Hanabusa, publié entre 1986 et 1993 au Japon, le manga met en scène la très jeune « Lady » Gwendoline, fille d’une Japonaise et d’un duc Anglais, alors qu’elle s’installe dans le manoir familial, en Angleterre, après la perte tragique de sa mère.
Si ses voisins Arthur et Edward, habiles cavaliers et véritables princes charmants, l’aident à devenir une vraie lady, sa future belle-mère et ses enfants lui feront endurer de multiples malheurs… qu’elle affrontera sans se départir de son charme et de sa gentillesse.

Adapté en dessin animé à partir de 1987, le manga arrive en France deux ans plus tard, dans l’émission Youpi ! L’école est finie (France 5). On assiste alors à un véritable boom de l’animé japonais dans l’hexagone. De Candy à Gwendoline, en passant par Princesse Sarah, la diffusion des séries jeunesses nippones s’accompagne d’une abondante création de produits dérivés, livres originaux, albums illustrés, jouets et gadgets en tout genre.  Cette nouvelle culture de masse marque toute une génération et se prolonge aujourd’hui par l’immense succès des mangas en librairie, parmi lesquels le shojo occupe une place prépondérante. Trop kawaii *!
* mignon, doux.

Camille Faucourt, conservatrice au Mucem

Enfant donnant à manger à une grenouille 


 

Enfant donnant à manger à une grenouille, Carte réclame, Chromolithographie carton, emploi d’or © Mucem

Enfant donnant à manger à une grenouille, Carte réclame, Chromolithographie carton, emploi d’or © Mucem

Carte réclame 
Chromolithographie
carton, emploi d’or
Hauteur : 11.1 cm
Largeur : 7.5 cm 
1942.26.81
Ce pourrait être une fable … Pour se faire encore plus grosse que le bœuf ?
Dans un paysage champêtre, composé d’oiseaux et de fleurs multicolores annonçant les beaux jours, une chromolithographie nous invite à partager une scène enchanteresse, pleine d’humour, de naïveté, de rêve, de bonté et sûrement d’amitié. Dans un médaillon ovale, la scène représente un jeune garçon portant vêtements printaniers : pantalon court, chandail à collerette et chapeau de paille à ruban rouge. Assis sur l’herbe, l’enfant verse de la main gauche une cuillerée de « Veloutine [F]AŸ » dans la bouche béante d’une grenouille verte aux motifs sombres. 

Cosmétique à base de poudre de riz, Veloutine fut mise au point et ainsi désignée par Charles Faÿ (1827-1903), parfumeur pour dames au 9 rue de la Paix vers la fin du XIXe siècle. Elle lui valut de recevoir la médaille d’argent à l’Exposition universelle de 1889.
Seuls les adultes croient savoir que les grenouilles sont friandes d’insectes et de mollusques à portée de leur langue adhésive mais CHUT, regardons plus attentivement la scène et réapprenons les joies de l’enfance et de la grenouille nourrie à la poudre de riz (au bismuth). 

Narjys El Alaoui, chargée de collections et de recherches

Lapin en peluche


 

Lapin en peluche Malte, 1994 Tissu synthétique, Mousse, Plastique 12.7 x 6.1x 9.7 cm © Mucem

Lapin en peluche Malte, 1994 Tissu synthétique, Mousse, Plastique 12.7 x 6.1x 9.7 cm © Mucem

Malte, 1994
Tissu synthétique, Mousse, Plastique
12.7 x 6.1 x 9.7 cm     
2005.229.66

Trop mignon ! Un petit lapin en peluche, tenant serré dans ses bras un cœur rouge, proclame « I love you ». À Malte, comme partout dans le monde, les jeunes amoureux ont coutume de s’offrir des peluches pour témoigner de la profondeur de leur affection. Salvina, donatrice de ce lapin à gros cœur, raconte ainsi la manière dont elle le reçut : « Il s’agit d’un cadeau d’amour. De seize ans (octobre 1994) à dix-huit ans (mai 1997), j’avais une relation amoureuse avec un camarade de lycée. Il m’a offert cette peluche pour fêter notre premier mois ensemble avec une carte de vœux. »

Les deux adolescents ne sont pas restés ensemble, mais la jeune femme a tout de même conservé cette peluche, souvenir de son premier amour. Puis elle l’a donnée au Mucem lorsqu’elle a été interrogée en 2005 par les chercheurs de l’enquête-collecte « Mariage en Méditerranée » afin de savoir ce que signifiait pour elle « amour » et « couple ». A ses yeux, et à ceux des collecteurs de l’enquête qui l’ont rapporté au musée, un petit lapin en peluche a autant de valeur symbolique qu’un bijou précieux : il parle de don, d’amour naissant, de sentiments délicats et partagés. Grâce à Savina, les collections françaises conserveront pour toujours un mignon témoignage d’une idylle adolescente !

Julia Ferloni, Conservatrice du patrimoine

June
Qee customisé



 

June Qee customisé, 2005 plastique moulé, peinture acrylique (bombe aérosol), marqueur, carton plié 26.6 x 13.5 x 17.3 cm. Signé et daté © Mucem

June Qee customisé, 2005 plastique moulé, peinture acrylique (bombe aérosol), marqueur, carton plié 26.6 x 13.5 x 17.3 cm. Signé et daté © Mucem

June Qee customisé, 2005 plastique moulé, peinture acrylique (bombe aérosol), marqueur, carton plié 26.6 x 13.5 x 17.3 cm. Signé et daté © Mucem

June Qee customisé, 2005 plastique moulé, peinture acrylique (bombe aérosol), marqueur, carton plié 26.6 x 13.5 x 17.3 cm. Signé et daté © Mucem

2005
plastique moulé, peinture acrylique (bombe aérosol), marqueur, carton plié
26.6 x 13.5 x 17.3 cm. Signé et daté 
2005.258.1.1-3
Cet ourson en plastique est une figurine customisée par la graffeuse June. Accompagnée de sa boîte, cette pièce a été réalisée par l’artiste lors d’un projet d’exposition-vente organisé par le commerçant et graffeur Ahero. Originaire de Lyon, June tague et peint, sur les murs et sur les trains, depuis 1997. 
 
L’œuvre a été acquise par le Mucem en 2005, dans le cadre d’une enquête-collecte sur le hip-hop et le graffiti. Cet ourson correspond à l’un des dix-huit personnages de la série “Qee”. Les Qees, prononcées ‘keys’, ont été créées par l’entreprise de jouet Toy2r, à Hong Kong. Utilisées comme accessoire ou comme jouet, elles suscitent aussi, depuis leur introduction sur le marché en 2002, l’engouement des collectionneurs.
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Les Qees peuvent être associées au début du mouvement des “art toys” ou “designer toys”. Ces termes désignent les figurines de collection commercialisées en édition limité. Les art toys apparaissent dans les années 1990, à Hong Kong, puis au Japon. On peut citer notamment les figurines des graffeurs new-yorkais Kaws et Futura 2000.
Face à ce succès, Toy2r propose également des Qees vierges D.I.Y. (Do It Yourself). Beaucoup d’artistes et de designers se les approprient et les customisent, notamment les graffeurs : c’est aussi le cas de June et du qee du Mucem.
 
Au-delà de l’histoire des qees dans le graffiti, cet ourson peut interroger sur ce qui nous attire dans les objets que l’on collectionne, et plus particulièrement dans ces figurines. 
Le qee  relève de l’esthétique du kawaii, adjectif japonais que l’on peut traduire par « mignon », mais qui représente aussi tout un phénomène culturel. Mignon, l’ourson renvoie à l’enfance, aux jouets, à ce qu’ils ont de familier, de réconfortant voire d’apaisant ! Il évoque nos doudous et nos nounours, synonymes de douceur, d’étreinte et de chaleur. 

Helia Paukner, Conservateur du patrimoine
 

La fougère en Forêt-Noire


 

La fougère en Forêt-Noire, Herold pour le chocolat Guérin-Boutron, carte réclame © Collection Mucem

La fougère en Forêt-Noire, Herold pour le chocolat Guérin-Boutron, carte réclame © Collection Mucem

Carte réclame
Éditeur : Herold pour le chocolat Guérin-Boutron, vers 1900
Hauteur : 6.4 cm Largeur : 10.4 cm 
1995.1.218.30
Cette chromolithographie pour une marque de chocolat célèbre nous rappelle que la Forêt- Noire est aussi un merveilleux gâteau dont la recette fut inventée au moment de la guerre de 14-18 par un jeune pâtissier souabe, Josef Keller. La Schwartzwälder Kirschtorte est composé d’un biscuit moelleux, de crème fouettée, de copeaux de chocolat et de cerises au kirsch. Après la guerre, Keller (décédé en 1981) ouvrit une pâtisserie au bord du lac de Constance où il prépara et servit ce gâteau jusqu’en 1947.
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Son apprenti, puis le fils de celui-ci, poursuivirent cette recette originale inventée par « der süsse Josef », « Joseph le sucré », « le doux », « le gentil » dans la pâtisserie historique, mais les meilleures pâtisseries de Berlin et des grandes villes d’Allemagne le proposaient dès le milieu des années 1930. 
En France, c’est surtout à partir des années 1950-1960 que l’on commence à trouver des forêts-noires dans les pâtisseries et à la carte de desserts des bons restaurants. Regardez les couleurs du costume de cette jeune femme : un corset noir comme les copeaux de chocolat, un chemisier blanc aux manches généreuses comme la crème fouettée, un chapeau et des rubans rouges comme les cerises au kirsch qui décorent le gâteau !

Mireille Jacotin, Conservatrice en chef du patrimoine

 


Noël 2020—Adoration des bergers, Naissance de Jésus-Christ


 

Adoration des bergers - Naissance de Jésus-Christ François Georgin Chez Pellerin, imprimeur – libraire et fabricant de cartes à jouer, à Épinal France © RMN-Grand Palais (MuCEM) / Jean-Gilles Berizzi

Adoration des bergers - Naissance de Jésus-Christ François Georgin Chez Pellerin, imprimeur – libraire et fabricant de cartes à jouer, à Épinal France © RMN-Grand Palais (MuCEM) / Jean-Gilles Berizzi

François Georgin
Chez Pellerin, imprimeur – libraire et fabricant de cartes à jouer, à Épinal
France
1827 (dépôt légal)
Estampe : gravure sur bois, imprimée et coloriée au pochoir sur papier vergé
39.7 x 64.8 cm (feuille) ; 36.3 x 56.9 cm (bois)

1979.82.133
 
Promesse d’une vie qui se rallume toujours, la Nativité du Christ que l’on célèbre la nuit de Noël presque partout dans le monde est la plus connue de toutes les fêtes chrétiennes. Croyants et non croyants se réjouissent ensemble aussi bien du solstice d’hiver (après lequel les jours commencent enfin à rallonger) que de la naissance d’un nouveau-né, porteur de tous les espoirs.
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Illustrant la naissance du Christ, l’Adoration des bergers relatée dans l’Évangile selon Luc est un thème récurrent de l’iconographie chrétienne. La gravure présentée ici a été réalisée par François Georgin (1801 - 1863), le plus réputé des graveurs sur bois de l’Imagerie d’Épinal. Son talent est aujourd’hui encore à ce point reconnu qu’une large part de son œuvre est souvent assimilée à la production du plus célèbre producteur d’images d’Épinal : la Fabrique Pellerin. Il a signé de son nom plus de deux cents gravures. La Naissance de Jésus-Christ est connue comme l’une des œuvres de la maturité du maître graveur d’Épinal. Ce grand bois reprend en grande partie la composition d’une « Adorazione dei pastori » (c. 1650) de Pietro da Cortona (Pietro Berrettini, dit), huile sur toile de grandes dimensions, toujours exposée dans la cathédrale de Santa Maria Assunta à Cortone (Toscane, Italie), dont diverses reproductions gravées (François Spierre, Cornelis Bloemaert, Carlo Grandi, etc.) ont circulé très tôt dans toute l’Europe.

Après que l’ange annonce aux bergers (c’est-à-dire aux plus humbles des hommes) qui gardent la nuit leurs troupeaux dans les prairies la naissance de Jésus, ceux-ci se rendent à Bethléem et découvrent Marie, Joseph et le nouveau-né. L’enfant est couché sur de la paille, et sa nudité témoigne qu’il est le Messie des pauvres. Pour rendre hommage à l’enfant Jésus dont le visage est entouré d’une gloire rayonnante, les bergers se prosternent avec respect. Au-dessus d’eux les anges témoignent de la présence de Dieu dans l’étable où, pour célébrer l’évènement mais aussi pour l’annoncer, on joue de la musique. La nativité est festive, et tous se réjouissent. Derrière une lourde porte, deux bœufs sont exclus de la scène : l’un d’entre eux observe l’adoration avec incrédulité cependant que l’autre, totalement étranger à ce qui advient, continue de manger son foin. Un des bergers a amené les deux colombes du sacrifice (Luc 2, 24), cependant qu’un deuxième tient dans ses bras un agneau, présage symbolique de la destinée de celui qui est venu pour sauver le monde (Jean 1, 29). Au premier plan de cette gravure, un homme en costume d’aristocrate a mis un genou en terre. Sa position témoigne de ce que, quelle que soit sa richesse dans ce monde, chacun est tenu de rendre honneur à Dieu. Cet homme, pourtant le plus fortuné de tous, s’agenouille aussi humblement que les autres, et reconnait cet enfant pour ce qu’il est. Parmi les premiers à rencontrer le Messie annoncé, il témoigne de sa joie et de son adoration en jouant (en souvenir sans doute des alors très fameux « Noëls Provençaux » de Nicolas Saboly) du galoubet et du tambourin.

Cette gravure, conservée au Mucem, est l’épreuve du dépôt légal du bois le 19 avril 1827. Le Mucem conserve également le bois gravé de cette œuvre, sous le numéro 1980.15.21. Le dépôt légal initié dès le XVIe siècle contraignait originellement l’imprimeur ou le graveur à déposer plusieurs originaux dans les services de l’administration, afin de surveiller et donc de réagir, notamment en interdisant. Longtemps, il constitue l’un des moyens de la censure. Durant toute la période qui suit la Révolution, et en particulier durant la Restauration (1815-1830), l’aristocratie revenue au pouvoir dénonce les textes de Diderot, de Voltaire, et de Rousseau comme incitant au mépris de la religion et du clergé. Pour installer dans les esprits une culture conforme à leur vision du monde social, l’Église et le pouvoir royal incitent ensemble les imprimeurs à développer une imagerie religieuse associant de manière efficace des images aux textes sacrés. 

Vincent Giovannoni, Conservateur en chef du patrimoine
Sources

LERCH Dominique, 1992, Imagerie populaire en Alsace et dans l’Est de la France, Presses Universitaires de Nancy
MUSEE DE L’IMAGE : museedelimage.fr
SABOLY Nicolas, 2014, Recueil des Noëls Provençaux. Lou Reviro-meinage, présentation, traductions, notes par Henri Moucadel, Ed. A l’asard Bautezar !
 
 

Marionnettes à gaine Nounours, Pimprenelle et Nicolas


 

Marionnettes à gaine Nounours, Pimprenelle et Nicolas Robert Cartelli 1970-1979 © Mucem

Marionnettes à gaine Nounours, Pimprenelle et Nicolas Robert Cartelli 1970-1979 © Mucem

Robert Cartelli
1970-1979
1986.28.9-11
Bonne nuit les petits
Un ours mais pas n’importe lequel, Nounours, rend visite à deux enfants, Pimprenelle et Nicolas, chaque soir avant le coucher. Comme une maman attentionnée et aimante, il leur raconte une histoire pour s’endormir et avant de retourner sur son nuage, il leur dit sur un ton bonhomme « Bonne nuit les petits, faites de beaux rêves ! ». Une pluie de sable doré tombe sur les enfants endormis alors que se fait entendre une mélodie jouée à la flûte par Ulysse, le marchand de sable. Cette série télévisée débute en 1962 tous les soirs vers 19h20 sur les écrans de la RTF puis de l’ORTF. C’est l’un des premiers programmes télévisés destinés à la jeunesse de la télévision française. Le petit écran s’invite très largement dans les foyers au cours des trente glorieuses, d’abord en noir et blanc puis en couleurs et fascine la génération des baby-boomers. Nounours (d’abord baptisé Gros Ours), Pimprenelle et Nicolas sont alors des  marionnettes manipulées par des marionnettistes pour la télévision. Nounours a le visage rond ; Nicolas est un petit enfant sage avec un pyjama rayé bleu et Pimprenelle, une petite fille blonde en chemise de nuit vichy rose, correspondant à l’image très genrée d’un petit garçon et d’une petite fille, à celle d’une famille idéale de l’après-guerre avec deux enfants garçon-fille, le « choix du roi » diraient certains.
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Ces marionnettes à gaine (manipulées avec les mains à l’intérieur) ont été réalisées dans les années soixante-dix sur le modèle des personnages de l’ORTF par Robert Cartelli pour son castellet de Boulogne-Billancourt. Marionnettiste, prestidigitateur, ombromane, ventriloque, Robert Cartelli fut le créateur du théâtre Polichinelle en 1932 avec sa femme Suzanne. Il a réalisé de nombreuses marionnettes qui s’inspiraient de personnages célèbres de dessins animés (Mickey, les trois petits cochons,…) ou de films comme Charlie Chaplin. Il reproduit ici pour son théâtre de marionnette les personnages célèbres de la série télévisée. Nounours est un ours en peluche qui, comme le rappelle l’historien médiéviste Michel Pastoureau, partage les frayeurs de l’enfant et son lit, est aussi peut-être son double, son ange gardien ou son premier dieu. Car l’ours était jadis le roi des animaux, bien avant le lion qui le supplanta dans le cœur des hommes au cours du moyen âge. L’Eglise lui attache alors une réputation inavouable et parvint à le destituer, à lui enlever sa couronne, effrayée qu’elle était par sa ressemblance avec l’homme et le culte que celui-ci lui vouait. L’ours en peluche, si mignon et si doux, qui fait craquer nos enfants et sans qui ils ne peuvent s’endormir, est en quelque sorte la revanche de l’animal. Aux dires de Michel Pastoureau, il subsiste en lui de nos jours un peu de dignité royale et Nounours, qui s’en retournait dans le ciel étoilé sur son nuage après avoir réussi à endormir les enfants de la télé, a sûrement contribué au 20e siècle à donner à l’ours une aura de divinité enfantine.

Françoise Dallemange, Chargée de collections et de recherches

 


Chromolithographie « Un voyage en gondole »


 

Chromolithographie « Un voyage en gondole », Benjamin Rabier (1864-1939), Début du 20e siècle © Mucem

Chromolithographie « Un voyage en gondole », Benjamin Rabier (1864-1939), Début du 20e siècle © Mucem

Benjamin Rabier (1864-1939)
Début du 20e siècle

1995.1.739.11
Benjamin Rabier n’a pas son pareil pour immortaliser les animaux. C’est en effet l’un des plus grands dessinateurs animaliers européens. Il a imaginé entre autres la célèbre Vache qui rit, vache rouge arborant un large sourire et une paire de boucles d’oreille, dessinée pour illustrer les boîtes de fromages individuels en forme de triangle de notre enfance. Cette vache rouge n’est pas arrivée par hasard sur ces boîtes de fromage. Benjamin Rabier fut en effet  soldat pendant la première guerre mondiale avec Léon Bel, fondateur de la fromagerie Bel. Il était notamment responsable du stock de viande de son unité et avait dessiné une vache rouge sur le camion de transport de viande fraîche, surnommée « la Wachkyrie ».
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De là, l’idée pour Léon Bel en 1921 de demander à Benjamin Rabier de lui dessiner cette vache rouge et souriante pour commercialiser ses boîtes de fromage. Le succès commercial fut immédiat. La Vache qui rit imaginée par Benjamin Rabier, qui va fêter ses cent ans l’année prochaine, figure toujours sur les boîtes de fromage et la marque a même commandé pour l’occasion des illustrations à des artistes contemporains comme Daniel Buren, ou Jonathan Monk. Certaines de ces boîtes collector ont été récemment acquises pour les collections du Mucem.
Benjamin Rabier fut surtout un dessinateur prolixe et observateur hors pair de tous nos animaux familiers mais aussi sauvages, flirtant parfois avec la caricature et l’anthropomorphisme. Il a ainsi illustré les Fables de La Fontaine, le Roman de Renart ou l’Histoire naturelle de Buffon.

Sur cette chromolithographie, distribuée autrefois comme carte bon-point ou récompense scolaire aux enfants sages et méritants, une petite souris dans un sabot de bois vogue au fil de l’eau sous les yeux ébahis d’un poisson un brin surpris : « Un voyage en gondole », dit la légende, comme si le petit rongeur était à Venise et invitait un poisson à partager son embarcation de fortune pour un périple romantique sur les canaux de la célèbre lagune. 

 

Statue de dévotion


 

Statue de dévotion © Mucem

Statue de dévotion © Mucem

H. 14 cm,
diam. 11,5 cm

1946.112.10
Trois bambins potelés sont dans un baquet. L’un en sort, se retenant au bord, un autre joint les mains en prière. Sont-ils au bain, dans une scène d’ablutions, de baptême ?
Les petits semblent se réveiller ensemble d’un rêve, dans ce qui n’est pas une baignoire mais… un saloir ! C’est leur résurrection par Saint Nicolas qu’a modelée un faïençais nivernais dans ce groupe à décor polychrome a compendiario, à traits concis rehaussant les figurines en relief, au moyen des couleurs qui supportent le grand feu, ici le jaune et le fameux bleu, posés sur la couverte en émail blanc. Statuette de dévotion, ce modèle du miracle de Saint Nicolas est conçu à la fin du 17ème siècle dans les ateliers de Nevers, alors premier centre de faïence en France, qui a importé la technique d’Italie. 

La fin de la légende est représentée ici :

« Le grand saint étendit trois doigts
Les enfants se levèrent tous les trois
Le premier dit : j’ai bien dormi, 
Le deuxième dit : et moi aussi,
A ajouté le plus petit :
Je croyais être au Paradis. »
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Il faut dire que le début est terrifiant. Si les images d’Epinal détaillent les scènes sur de grandes planches, on imagine mal des bibelots de paillasse sanguinolente décorer les cheminées. En effet, la chanson est bien connue des trois pauvres petits enfants perdus demandant l’hospitalité au boucher qui « Les a coupés en p’tits morceaux Et puis salés dans un tonneau » ou « Et mis au saloir comme pourceaux »
Sept années plus tard, Saint Nicolas passa par-là, et l’on connaît l’heureux dénouement.
Saint patron des enfants, des écoliers, des marins, des opprimés, Saint Nicolas est fêté le 6 décembre en Europe du Nord et de l’Est, aussi dans les pays de tradition orthodoxe ; il est populaire en Grèce, en Serbie, et particulièrement en Russie où il est honoré le 19 décembre. En France, la descente des beffrois des Flandres et de l’Artois par le Saint barbu sous sa mitre est un événement local, et les écoliers échangent des cartes, à la Saint-Nicolas pour les garçons, à la Sainte-Catherine pour les filles. Cependant, c’est dans l’Est et spécialement en Lorraine que la célébration est aussi fabuleuse que collective. La fête précède Noël et s’y substitue pour les enfants, elle leur est complètement dédiée. Chaque village a son défilé de char, sur lequel trois écoliers en haillons lancent des bonbons. Saint Nicolas, distribue des friandises, du pain d’épice à son effigie, des fruits secs et confits et des pâtes de fruits. Les filles chantent : « Saint Nicolas mon bon patron, apporte-nous des macarons, des mirabelles pour les d’moiselles, des coups de bâton pour les garçons. » C’est le Père Fouettard, avatar du boucher, qui punit les cancres et les garnements à volées de trique. Appelé Hans Trapp en Alsace, il change de nom comme de pays. À Nancy, placée sous la protection du Saint lors de la bataille victorieuse pour la ville en 1477, les spectaculaires fêtes de Saint Nicolas sont inscrites à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel depuis 2018.
Nicolas le thaumaturge vient de Méditerranée : évêque de Myre, en Asie mineure, où il meurt au milieu du 4ème siècle, ses reliques furent volées au 11ème siècle et apportées à Bari en Italie (la translation est commémorée en mai), puis à côté de Nancy, à Port, qui devint Saint-Nicolas de Port. Au milieu du 13ème siècle, un chevalier lorrain prisonnier des Turcs s’en remis au Saint ; il fut exfiltré de sa geôle et réapparut sur le parvis de l’église. Une procession aux flambeaux commémore encore ce miracle à la basilique de Saint-Nicolas-de-Port.
Le nom du saint populaire, qui signifie « vainqueur du peuple », l’est tout autant. Le 6 décembre, souhaitons aussi bonne fête aux Nicole, Coline et Colette !

 


Cervidé


 

Cervidé, pain, 1996-2000 © Mucem

Cervidé, pain, 1996-2000 © Mucem

Pain,
1996-2000
2004.9.727
S’il est habituel de rencontrer dans les musées des œuvres sculptées en bois ou en pierre, les œuvres modelées dans du pain sont moins fréquentes dans les collections publiques. Le Mucem conserve pourtant dans ses collections plus de 1600 pièces réalisées dans ce matériau, des œuvres en relief, haut ou bas, mais aussi des « ronde-bosses », comme ce petit cervidé, c’est-à-dire des œuvres réalisées en 3 dimensions. 
Produit de base de l’alimentation méditerranéenne, le pain est également support de croyances, comme le rappelle le sacrement de l’eucharistie pour les chrétiens.  En Europe, notamment en Italie et en Grèce, il est encore aujourd’hui présent dans de nombreux rituels. On fabrique et consomme ainsi des pains décorés pour célébrer un évènement heureux, comme un mariage ou une naissance, ou des pains réalisés en forme de membre (bras ou jambe), d’organe ou d’animal qu’on offre comme ex voto, pour demander une protection ou remercier d’une grâce accordée. 
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La conservation de ces objets en matériau périssable n’est évidemment pas sans poser de problème. Conservée à basse température pour limiter la prolifération des nuisibles, en particulier des insectes, la collection fait l’objet au Mucem d’un soin tout particulier. En cas d’infestation constatée, les pains sont congelés pour éliminer œufs et larves avant d’être minutieusement aspiré pour faire disparaitre tous les résidus susceptibles d’attirer de nouveaux insectes. La conservation est parfois un sport de combat contre un ennemi minuscule mais redoutable et potentiellement ravageur.
Tout ce qui est petit n’est donc pas forcement mignon, mais ce petit cervidé d’une dizaine de centimètres de haut seulement, grands yeux ouverts et sourire aux lèvres, attire quant à lui notre bienveillance. Peut-être que l’approche des fêtes de fin d’année, et l’attente pour les plus jeunes du Père Noël, nous rend plus enclins à trouver cet animal qui tient du renne plus sympathique que tout autre… 

Marthe et Juliette Vesque


 

Marthe et Juliette Vesque Numéros de Cirque : les Savoirs et Frank Pichel, décembre 1923 Mine de plomb, encre brune, aquarelle sur papier, 30 x 20,3 cm © Mucem

Marthe et Juliette Vesque Numéros de Cirque : les Savoirs et Frank Pichel, décembre 1923 Mine de plomb, encre brune, aquarelle sur papier, 30 x 20,3 cm © Mucem

Numéros de Cirque : les Savoirs et Frank Pichel, décembre 1923
Mine de plomb, encre brune, aquarelle sur papier, 30 x 20,3 cm
1962.67.8

Le 25 décembre 1923, Marthe et Juliette Vesque prennent place sur les gradins du Cirque d’hiver. Mais ce ne sont pas de simples spectatrices : à la plume et à l’aquarelle, elles documentent les numéros des artistes circassiens qui s’y produisaient. Sur ce feuillet conservé au Mucem, elles croquent avec tendresse et sensibilité un duo d’acrobates, les Savoirs, une contorsionniste, et Frank Pichel, un artiste comique. Ce dernier a marqué l’histoire du cirque et du music-hall : dans les années 1920, il a fait rire le monde entier avec sa parodie de la danseuse ou encore sa lutte contre lui-même. Manifestement, c’est encore une parodie à laquelle il se livre sous l’œil des dessinatrices : il fait monter sur scène un cochon – c’est incongru pour un dompteur ! – , l’habille, le fait se lever sur ses pattes arrière et l’enlace : drôle de romance ! Il n’empêche, l’image qui en résulte est pleine de douceur et mignonne à croquer et… les sœurs Vesque ne s’en privent pas !
Ce dessin n’est pas un feuillet unique : pendant près de 50 ans les inséparables « Demoiselles Vesque » ont assidument fréquenté les chapiteaux et les saltimbanques. Leurs dessins, leurs journaux, leurs écrits, sont une source inestimable de renseignements pour qui s’intéresse au cirque dans la première moitié du XXe siècle. Au décès des sœurs Vesque, l’ensemble du fonds a été légué au Musée national des Arts et Traditions populaires, et ce sont près de 14500 dessins et albums qui font aujourd’hui partie des collections du Mucem. 
 


 


Le dépit amoureux ou Je ne peux plus courir et j’ai l’œil tout rouge


 

Le dépit amoureux ou Je ne peux plus courir et j’ai l’œil tout rouge Philippe Ragault,  1990 Dieppe, France ivoire et rubis 9 x 4 cm © Mucem/Yves Inchierman

Le dépit amoureux ou Je ne peux plus courir et j’ai l’œil tout rouge Philippe Ragault, 1990 Dieppe, France ivoire et rubis 9 x 4 cm © Mucem/Yves Inchierman

Philippe Ragault, 
1990
Dieppe, France
ivoire et rubis
9 x 4 cm
1997.52.1
Trop mignon et précieux, ce petit lapin blessé constitué d’ivoire et de rubis ! La délicatesse et le réalisme de son pelage donnent envie d’enfouir son nez dans sa fourrure immaculée, de presser son petit corps contre notre cœur pour un gros câlin. Sa patte en écharpe fait monter en nous une bouffée de tendresse, un besoin de le protéger. Et c’est justement sur ce sentiment que joue son créateur, l’un des derniers artistes ivoiriers de Dieppe, ville normande célèbre pour ses ateliers de sculpture de l’ivoire.
L’œuvre de Philippe Ragault porte sur la tradition ivoirière un regard satirique et tendre. La sculpture animalière est ici exploitée pour délivrer un double message. Ce lapin à la patte en écharpe et à l’œil rouge évoque en effet les difficultés du métier d’ivoirier, confronté à l’opprobre qui le condamne dans l’opinion publique comme prédateur de la nature en général et des éléphants en particulier. Il évoque également, selon son auteur, les peines d’amour dont les effets sont aussi dévastateurs que la Convention de Washington pour les artisans travaillant les matières précieuses animales.
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Ratifiée par la France en 1978, la Convention de Washington (ou CITES) sur le commerce international des espèces sauvages en voie d’extinction a particulièrement touché les filières artisanales ayant recours à des matières premières dont l’accès est aujourd’hui fortement réglementé. C’est dans ce contexte qu’entre 1997 et 1998, le Musée des Arts et Traditions populaires a lancé une enquête-collecte auprès de métiers d’art eux-mêmes menacés de disparition : ivoiriers, écaillistes, plumassiers, paruriers et corailleurs ont démontré au cours de cette enquête leur capacité à réinventer leur activité alors même qu’ils ne pouvaient plus utiliser leurs précieux matériaux. Et donc à produire des œuvres de grande qualité dans un contexte nouveau. 
Les chefs-d’œuvre de ces artisans du luxe sont à découvrir au Centre de Conservation et de Ressources du Mucem chaque premier mardi du mois. A noter sur vos agendas en vue du déconfinement !
 

Duo des chats


 

Gioachino Rossini Mady Mesplé et Jane Berbié, au piano Janine Reiss Pochette de vinyle, 1972 © Mucem/Yves Inchierman

Gioachino Rossini Mady Mesplé et Jane Berbié, au piano Janine Reiss Pochette de vinyle, 1972 © Mucem/Yves Inchierman

Gioachino Rossini
Mady Mesplé et Jane Berbié, au piano Janine Reiss
Pochette de vinyle, 1972
2003.196.15
Le Duo des chats - en italien Duetto buffo di due gatti, qui pourrait se traduire littéralement par Duo humoristique de deux chats - est une pièce vocale populaire pour deux sopranos, parodie d'un duo amoureux. 

Cette œuvre est en général attribuée au compositeur italien Gioacchino Rossini (1792-1868) mais elle n'aurait en fait pas été écrite par lui. Elle serait une compilation du compositeur anglais Robert Lucas de Pearsell écrite en 1825 sous son pseudonyme G. Berthold et reprenant, entre autres, des passages d’Otello, opéra composé par Rossini en 1816. 
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Depuis sa création à l’époque de Rossini, cette pièce n’a rien perdu de son charme pour les chanteurs, les mélomanes ou les amoureux des chats. Les paroles sont une succession ininterrompue de l’onomatopée féline « miaou ». Le Duo des chats est une étonnante parodie d’amour humain en version féline. Les chats amoureux y miaulent, ronronnent langoureusement, se griffent et se réconcilient à l’instar d’un couple d’amoureux.  Cette mélodie parodique est infiniment drôle et semble facile à interpréter mais il n’en est rien. La tessiture de soprano colorature de Magdeleine dite Mady Mesplé, disparue en mai dernier, lui permettait en effet ces vocalises acrobatiques. Jane Berbié, pourvue elle d’une tessiture de mezzo-soprano et donc un peu plus grave, lui répondait dans le rôle du chat mâle.

La chanson débute par un premier mouvement lent, un adagio, dialogue du chat et de la chatte  se répondant, suivi d’un andante et d’un allegretto plus rapides. Les nuances des voix expriment des sentiments alternant entre tristesse et gaîté, colère et douceur, espièglerie et timidité… L’acmé du morceau est un festival de miaulements énamourés ! « Un peu de douceur dans ce monde de brutes » dirait un célèbre slogan publicitaire.

La pochette du disque vinyle dont l’enregistrement date de 1972 illustre ce dialogue félin et amoureux avec deux chats blancs aux yeux bleus. Ils sont lovés face à face dans un médaillon ovale, la tête pourvue de bijoux, collier pour l’un et ferronnière pour l’autre. A la manière des partitions du début du siècle si nombreuses dans les collections du Mucem, l’illustration est cernée de feuillages évoquant les papiers découpés de Matisse. Mais ne serait-ce pas plutôt deux chattes blanches rappelant le charme félin des sopranos Mady Mesplé et Jane Berbié ?

 


Mademoiselle de Champrobert et un lionceau


 

Mademoiselle de Champrobert et un lionceau, tirage photographique sur papier, Paris, 1912 © Mucem

Mademoiselle de Champrobert et un lionceau, tirage photographique sur papier, Paris, 1912 © Mucem

Tirage photographique sur papier,
Paris,
1912 © Mucem

« Trop mignon ! ». Cette image appellera pour beaucoup de genre d’exclamation. Elle est issue de l’important fonds de photographies et cartes postales consacré au monde du cirque que le peintre animalier Gustave Soury (1874-1966) a collectionné puis légué au Musée national des Arts et Traditions populaires, ancêtre du Mucem. Elle montre une petite fille tenant tendrement et fièrement dans ses bras le lionceau que la célèbre danseuse de cancan La Goulue avait donné à M. de Champrobert, circassien, en échange d’une panthère. 

Au-delà du caractère de témoignage sur le monde du cirque en France au début du 20e siècle, ce cliché peut aussi interroger sur la nature des émotions qui sont les nôtres lorsqu’on regarde une image. Pourquoi s’attendrit-on en regardant ce duo ? Qu’est-ce qui nous pousse à nous extasier ? La science s’est penchée sur la question. 
 
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L’éthologue autrichien Konrad Lorenz (1903-1989), prix Nobel de physiologie ou médecine en 1973,  est le premier théoricien du « mignon ». En 1943, il explique que la tendresse et la bienveillance dont nous faisons preuve envers les enfants ou les bébés animaux sont de réactions comportementales innées induites par l’apparence juvénile des petits. La vue de caractéristiques morphologiques précises provoquerait, selon l’auteur, ces réactions automatiques. Lorenz décrit ces traits morphologiques dans ce qu’il nomme alors le Kindchenschema ou « schéma du nourrisson ». Des traits caractéristiques que l’on retrouve dans cette petite fille et son lionceau adorables : une tête disproportionnée, un grand front, de grands yeux, des membres courts et dodus, un corps rondelet, une peau souple et élastique. Notre état émotionnel serait ainsi conditionné par la reconnaissance de ces caractéristiques infantiles et garantirait la survie de l’espèce, l’attendrissement provoqué poussant à prodiguer les bons soins.  

Reste à savoir qui, de la petite fille ou du petit lion, est le plus mignon des deux… Et ça, la science aurait du mal à le dire « objectivement », à vous de trancher !