Folklore

Vassily Kandinsky, Die Raben [Les Corbeaux], 1907. Linogravure. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Paris © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Die Raben [Les Corbeaux], 1907. Linogravure. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Paris © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Die Raben [Les Corbeaux], 1907. Linogravure. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Paris © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Lied [Chant], 1906, tempera sur carton glacé, 49 x 66 cm. Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris, Legs de Nina Kandinsky, 1981 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Lied [Chant], 1906, tempera sur carton glacé, 49 x 66 cm. Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris, Legs de Nina Kandinsky, 1981 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Július Koller, Univerzálny Folkloristický Obyčaj (U.F.O.) – Čičmany [Coutume folklorique universelle (U.F.O.) – Čičmany)], 1978, épreuve photographique. Slovenská národná galéria, Bratislava © Julius Koller / Slovak National Gallery
Július Koller, Univerzálny Folkloristický Obyčaj (U.F.O.) – Čičmany [Coutume folklorique universelle (U.F.O.) – Čičmany)], 1978, épreuve photographique. Slovenská národná galéria, Bratislava © Julius Koller / Slovak National Gallery

Sait-on que Vassily Kandinsky a commencé sa carrière en tant qu’ethnographe en Russie ? Que l’arrière-grand-père de Constantin Brâncuși était un bâtisseur d’églises traditionnelles en Roumanie ? Que Natalia Gontcharova a développé une peinture abstraite en s’inspirant de costumes espagnols, ou encore que Joseph Beuys déclarait voir dans le folklore un outil de compréhension pour le futur ?

Assimilé à la tradition, et donc en apparence à l’opposé de l’idée d’avant-garde, l’univers du folklore infiltre pourtant des pans entiers de la modernité et de la création contemporaine. Loin des clichés d’un passéisme suranné, les artistes ont pu y trouver une source d’inspiration, une puissance régénératrice, aussi bien qu’un objet d’analyse critique ou de contestation.

Des prémices de l’art moderne à l’art le plus actuel, cette exposition, conçue par le Centre Pompidou-Metz et le Mucem, retrace les relations parfois ambiguës qu’entretiennent les artistes avec le folklore. Elle permet également la rencontre entre histoire de l’art et histoire des sciences humaines : en effet, grâce aux fonds du Mucem, héritier du musée national des Arts et Traditions populaires, elle dévoile en parallèle l’invention d’une discipline, et permet des face-à-face inattendus.

L’exposition présente plus de 360 œuvres et objets, dont 190 pièces issues des collections du Mucem et près de 170 œuvres d’art moderne et contemporain dont une grande partie est conservée au musée national d’Art moderne, Centre Pompidou.

—Commissariat : Jean-Marie Gallais, responsable du pôle programmation au Centre Pompidou-Metz
—Marie-Charlotte Calafat, responsable du département des collections et des ressources documentaires, conservatrice du patrimoine, responsable du secteur histoire au Mucem
—Chargé de recherche et d’exposition : Arnaud Dejeammes, Centre Pompidou-Metz
—Scénographie : Pascal Rodriguez
—L’exposition a été conçue et organisée par le Centre Pompidou-Metz (du 21 mars au 21 septembre 2020) en partenariat avec le Mucem.

Éditions

    
Catalogue d’exposition

Collectif sous la direction de Jean-Marie Gallais et Marie-Charlotte Calafat

Auteurs : Marie-Charlotte Calafat, Manuel Charpy, Arnaud

Découvrir

 Folklore : l’émission Le Direct 

Re(découvrez) l’exposition « Folklore » dans l’émission diffusée en direct sur les réseaux sociaux le 3 novembre 2020.

Avec Marie-Charlotte Calafat et Jean-Marie Gallais (commissaires de l’exposition), Laëtitia Olivier (chargée de production Mucem), Cécile Dumoulin (responsable du département du développement culturel et des publics Mucem), Dalila Belaza (danseuse et chorégraphe).

Émission animée par la journaliste Olga Bibiloni. 

Visionner

« Terroir-isme »

TERROIRISME  [teʁwaʁism] : nom masculin très variable qui n’existe pas et qu’on se gardera d’inventer, mais dont on explorera les ramifications dans les champs artistiques, politiques.
Une chronique à feuilleter, en 12 épisodes.

Lire

  • Entretien avec Marie-Charlotte Calafat et Jean-Marie Gallais, commissaires de l’exposition

     

    Mucem (M.)

    Cette exposition met en évidence les liens méconnus entre folklore et création artistique : comment s’est traduite cette influence du folklore dans l’histoire de l’art ?
     

     

     

    Marie-Charlotte Calafat (M.C.C.) 

    Le folklore se situe au croisement de l’histoire de l’art et des sciences humaines. Pour un musée comme le Mucem, il constitue un sujet privilégié, car il permet de proposer une relecture de ses collections d’art populaire en les mettant en regard avec ce qui pourrait sembler être leurs opposées : les œuvres des artistes de l’avant-garde des XIXe et XXe siècles. En observant les rapprochements des positions entre artistes et folkloristes, on comprend mieux les interactions entre deux mondes, celui du traditionalisme et celui du modernisme, c’est-à-dire celui des « demi-savants » (pour reprendre l’expression du célèbre folkloriste Arnold Van Gennep) et celui de la création contemporaine.

     

     

    Jean-Marie Gallais (J.M.G.)

    Les sections du parcours donnent aussi des indices de ce qui a pu intéresser les artistes dans le folklore : une quête des origines et une échappatoire vis-à-vis des conventions et de l’académisme, mais aussi un support de critique et de subversion, ou encore un répertoire de formes, de motifs et de techniques. D’autres ont pu s’adonner à une exploration de l’immatériel, des croyances ou des rituels, et à la manière de folkloristes, s’intéresser aux méthodes d’enquête, de collecte, de classement et d’exposition. Si l’influence de l’art africain, océanien ou encore de l’art brut sur l’avant-garde a été étudiée, le domaine du folklore, si difficile à circonscrire, l’a beaucoup moins été. On constate pourtant depuis le XIXe siècle que les artistes y ont beaucoup puisé et s’en sont nourris, y voyant une énergie et une créativité à même de renouveler le langage de l’art.

     

     

    M.

    Pourquoi le terme « folklore » est-il parfois source de polémiques ?

     

     

    M.C.C.

    La question initiale que nous nous sommes posée est la suivante : comment définir le folklore ? Ou, plus précisément, l’objet folklorique existe-t-il en tant que tel ? Chercher dans une base de données muséale le mot « folklore » ne produit que quelques réponses disparates. La recherche dans les sources écrites apporte une première réponse ; elle montre une variété de points de vue sur ce qu’il est : le folklore se définit problématiquement, traverse des controverses et des polémiques, et finit par tomber en désuétude, voire en disgrâce, dans sa version diminuée de « folklo ». La récupération politique du folklore durant le gouvernement de Vichy en France, en particulier de son imagerie autour de la terre et du paysan, et des activités qui lui sont liées telles les fêtes populaires, est traitée dans l’exposition dans une section intitulée « Ambiguïtés et paradoxes ». L’autre facteur qui explique la dépréciation du folklore est le manque de légitimité de cette discipline, où la méthode et la rigueur scientifiques font parfois défaut : en effet, les folkloristes font preuve dans leurs recherches d’une grande créativité, voire même d’une certaine fantaisie.

     

     

    M.

    Quelles sont les pièces les plus remarquables au sein de l’exposition ?

     

     

    J.M.G.

    L’exposition fonctionne par études de cas et ce sont les ensembles issus de plusieurs collections, principalement du Mucem et du Centre Pompidou, qui forment les moments plus remarquables. Les rapprochements s’appuient sur les témoignages des artistes : un oiseau de bois sculpté et peint qui a appartenu à Kandinsky prend également une autre dimension, rapproché de l’abstraction Ovale 2 de 1925. Citons aussi, parmi d’autres exemples, les échantillons textiles des collections ethnographiques mis en regard avec les enseignements du Bauhaus ou de l’école d’arts appliqués de Zurich ; ou encore les amulettes collectées et documentées par le folkloriste Lionel Bonnemère à proximité des recherches d’André Breton ou de Joseph Beuys sur les superstitions.

     

     

    M.C.C.

    D’un bocal de noyaux de cerise à une porte de ferme monumentale roumaine en bois, les curiosités ne manquent pas, dans l’exposition, pour montrer en quoi les folkloristes ont redécouvert, modelé, occulté, falsifié le passé comme le présent, participant ainsi, avec leur subjectivité propre, à l’élaboration de fictions. Ce qui est le plus remarquable, c’est le dialogue qui s’opère entre ces artefacts souvent délaissés et les œuvres d’artistes majeurs. La porte roumaine dialogue par exemple parfaitement avec la sculpture Maiastra de Brancusi, qui joue sur l’écart entre tradition et modernité.

     

     

    M.

    Durant vos recherches autour de cette exposition, quelle a été votre découverte la plus marquante ?

     

     
     
     

    J.M.G.

    Le projet de Claudio Costa ! En 1975, à Monteghirfo, village reculé de l’arrière-pays génois, cet artiste inaugure le « Musée d’anthropologie active ». L’expérience naît à la suite de la découverte d’une maison du village, abandonnée et restée intacte après le décès du dernier occupant, les volets simplement clos. Tel un ethnographe, Costa décide d’intervenir de façon minimale : il dépoussière, éclaire et catalogue l’ensemble des objets, meubles, outils trouvés sur place, qu’il étiquette dans le dialecte local. L’artiste documente également leur usage et leur fonction. Il compilera notamment une « enquête sur une culture », interrogeant les habitants du village sur leurs modes de vie : habitat, type physique, alimentation et cuisine, économie et productions, vie familiale et domestique, vie sociale, vie religieuse, etc. Le projet de Costa coïncide également avec l’aboutissement des réflexions de Georges Henri Rivière sur le concept d’écomusée.

     

     

    M.

    Cette exposition est enfin le fruit d’une collaboration entre deux musées en région…

     

     

    M.C.C.

    et

    J.M.G.

    Nous nous réjouissons que le Centre Pompidou-Metz et le Mucem aient su joindre leurs forces autour de ce projet. Les collections du Mucem témoignent indéniablement de l’activité des premiers folkloristes, et il est précieux de confronter la réalité de l’institution actuelle au passé de la discipline. Elles permettent aussi de refléter un certain ancrage régional, qui fait partie de l’ADN des deux institutions, qui les réunit, et prend un sens particulier avec une telle exposition : l’une est établie en Lorraine, mais aussi au cœur de l’Europe, l’autre en Provence, mais aussi au cœur de la Méditerranée. Le Centre Pompidou-Metz, s’il ne possède pas de collections, travaille très étroitement avec celles du Musée national d’art moderne, dont les formidables fonds d’ateliers, tels ceux de Vassili Kandinsky ou de Constantin Brancusi, témoignent de l’attrait de ces artistes pour l’art populaire et le folklore, et dont la richesse a permis de mener cette enquête depuis les prémices de l’art moderne jusqu’à aujourd’hui.
     

     

     

Sait-on que Vassily Kandinsky a commencé sa carrière en tant qu’ethnographe en Russie ? Que l’arrière-grand-père de Constantin Brâncuși était un bâtisseur d’églises traditionnelles en Roumanie ? Que Natalia Gontcharova a développé une peinture abstraite en s’inspirant de costumes espagnols, ou encore que Joseph Beuys déclarait voir dans le folklore un outil de compréhension pour le futur ?

Assimilé à la tradition, et donc en apparence à l’opposé de l’idée d’avant-garde, l’univers du folklore infiltre pourtant des pans entiers de la modernité et de la création contemporaine. Loin des clichés d’un passéisme suranné, les artistes ont pu y trouver une source d’inspiration, une puissance régénératrice, aussi bien qu’un objet d’analyse critique ou de contestation.

Des prémices de l’art moderne à l’art le plus actuel, cette exposition, conçue par le Centre Pompidou-Metz et le Mucem, retrace les relations parfois ambiguës qu’entretiennent les artistes avec le folklore. Elle permet également la rencontre entre histoire de l’art et histoire des sciences humaines : en effet, grâce aux fonds du Mucem, héritier du musée national des Arts et Traditions populaires, elle dévoile en parallèle l’invention d’une discipline, et permet des face-à-face inattendus.

L’exposition présente plus de 360 œuvres et objets, dont 190 pièces issues des collections du Mucem et près de 170 œuvres d’art moderne et contemporain dont une grande partie est conservée au musée national d’Art moderne, Centre Pompidou.

—Commissariat : Jean-Marie Gallais, responsable du pôle programmation au Centre Pompidou-Metz
—Marie-Charlotte Calafat, responsable du département des collections et des ressources documentaires, conservatrice du patrimoine, responsable du secteur histoire au Mucem
—Chargé de recherche et d’exposition : Arnaud Dejeammes, Centre Pompidou-Metz
—Scénographie : Pascal Rodriguez
—L’exposition a été conçue et organisée par le Centre Pompidou-Metz (du 21 mars au 21 septembre 2020) en partenariat avec le Mucem.

Éditions

    
Catalogue d’exposition

Collectif sous la direction de Jean-Marie Gallais et Marie-Charlotte Calafat

Auteurs : Marie-Charlotte Calafat, Manuel Charpy, Arnaud

Découvrir

 Folklore : l’émission Le Direct 

Re(découvrez) l’exposition « Folklore » dans l’émission diffusée en direct sur les réseaux sociaux le 3 novembre 2020.

Avec Marie-Charlotte Calafat et Jean-Marie Gallais (commissaires de l’exposition), Laëtitia Olivier (chargée de production Mucem), Cécile Dumoulin (responsable du département du développement culturel et des publics Mucem), Dalila Belaza (danseuse et chorégraphe).

Émission animée par la journaliste Olga Bibiloni. 

Visionner

« Terroir-isme »

TERROIRISME  [teʁwaʁism] : nom masculin très variable qui n’existe pas et qu’on se gardera d’inventer, mais dont on explorera les ramifications dans les champs artistiques, politiques.
Une chronique à feuilleter, en 12 épisodes.

Lire

Vassily Kandinsky, Die Raben [Les Corbeaux], 1907. Linogravure. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Paris © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Die Raben [Les Corbeaux], 1907. Linogravure. Centre Pompidou, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Paris © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
  • Entretien avec Marie-Charlotte Calafat et Jean-Marie Gallais, commissaires de l’exposition

     

    Mucem (M.)

    Cette exposition met en évidence les liens méconnus entre folklore et création artistique : comment s’est traduite cette influence du folklore dans l’histoire de l’art ?
     

     

     

    Marie-Charlotte Calafat (M.C.C.) 

    Le folklore se situe au croisement de l’histoire de l’art et des sciences humaines. Pour un musée comme le Mucem, il constitue un sujet privilégié, car il permet de proposer une relecture de ses collections d’art populaire en les mettant en regard avec ce qui pourrait sembler être leurs opposées : les œuvres des artistes de l’avant-garde des XIXe et XXe siècles. En observant les rapprochements des positions entre artistes et folkloristes, on comprend mieux les interactions entre deux mondes, celui du traditionalisme et celui du modernisme, c’est-à-dire celui des « demi-savants » (pour reprendre l’expression du célèbre folkloriste Arnold Van Gennep) et celui de la création contemporaine.

     

     

    Jean-Marie Gallais (J.M.G.)

    Les sections du parcours donnent aussi des indices de ce qui a pu intéresser les artistes dans le folklore : une quête des origines et une échappatoire vis-à-vis des conventions et de l’académisme, mais aussi un support de critique et de subversion, ou encore un répertoire de formes, de motifs et de techniques. D’autres ont pu s’adonner à une exploration de l’immatériel, des croyances ou des rituels, et à la manière de folkloristes, s’intéresser aux méthodes d’enquête, de collecte, de classement et d’exposition. Si l’influence de l’art africain, océanien ou encore de l’art brut sur l’avant-garde a été étudiée, le domaine du folklore, si difficile à circonscrire, l’a beaucoup moins été. On constate pourtant depuis le XIXe siècle que les artistes y ont beaucoup puisé et s’en sont nourris, y voyant une énergie et une créativité à même de renouveler le langage de l’art.

     

     

    M.

    Pourquoi le terme « folklore » est-il parfois source de polémiques ?

     

     

    M.C.C.

    La question initiale que nous nous sommes posée est la suivante : comment définir le folklore ? Ou, plus précisément, l’objet folklorique existe-t-il en tant que tel ? Chercher dans une base de données muséale le mot « folklore » ne produit que quelques réponses disparates. La recherche dans les sources écrites apporte une première réponse ; elle montre une variété de points de vue sur ce qu’il est : le folklore se définit problématiquement, traverse des controverses et des polémiques, et finit par tomber en désuétude, voire en disgrâce, dans sa version diminuée de « folklo ». La récupération politique du folklore durant le gouvernement de Vichy en France, en particulier de son imagerie autour de la terre et du paysan, et des activités qui lui sont liées telles les fêtes populaires, est traitée dans l’exposition dans une section intitulée « Ambiguïtés et paradoxes ». L’autre facteur qui explique la dépréciation du folklore est le manque de légitimité de cette discipline, où la méthode et la rigueur scientifiques font parfois défaut : en effet, les folkloristes font preuve dans leurs recherches d’une grande créativité, voire même d’une certaine fantaisie.

     

     

    M.

    Quelles sont les pièces les plus remarquables au sein de l’exposition ?

     

     

    J.M.G.

    L’exposition fonctionne par études de cas et ce sont les ensembles issus de plusieurs collections, principalement du Mucem et du Centre Pompidou, qui forment les moments plus remarquables. Les rapprochements s’appuient sur les témoignages des artistes : un oiseau de bois sculpté et peint qui a appartenu à Kandinsky prend également une autre dimension, rapproché de l’abstraction Ovale 2 de 1925. Citons aussi, parmi d’autres exemples, les échantillons textiles des collections ethnographiques mis en regard avec les enseignements du Bauhaus ou de l’école d’arts appliqués de Zurich ; ou encore les amulettes collectées et documentées par le folkloriste Lionel Bonnemère à proximité des recherches d’André Breton ou de Joseph Beuys sur les superstitions.

     

     

    M.C.C.

    D’un bocal de noyaux de cerise à une porte de ferme monumentale roumaine en bois, les curiosités ne manquent pas, dans l’exposition, pour montrer en quoi les folkloristes ont redécouvert, modelé, occulté, falsifié le passé comme le présent, participant ainsi, avec leur subjectivité propre, à l’élaboration de fictions. Ce qui est le plus remarquable, c’est le dialogue qui s’opère entre ces artefacts souvent délaissés et les œuvres d’artistes majeurs. La porte roumaine dialogue par exemple parfaitement avec la sculpture Maiastra de Brancusi, qui joue sur l’écart entre tradition et modernité.

     

     

    M.

    Durant vos recherches autour de cette exposition, quelle a été votre découverte la plus marquante ?

     

     
     
     

    J.M.G.

    Le projet de Claudio Costa ! En 1975, à Monteghirfo, village reculé de l’arrière-pays génois, cet artiste inaugure le « Musée d’anthropologie active ». L’expérience naît à la suite de la découverte d’une maison du village, abandonnée et restée intacte après le décès du dernier occupant, les volets simplement clos. Tel un ethnographe, Costa décide d’intervenir de façon minimale : il dépoussière, éclaire et catalogue l’ensemble des objets, meubles, outils trouvés sur place, qu’il étiquette dans le dialecte local. L’artiste documente également leur usage et leur fonction. Il compilera notamment une « enquête sur une culture », interrogeant les habitants du village sur leurs modes de vie : habitat, type physique, alimentation et cuisine, économie et productions, vie familiale et domestique, vie sociale, vie religieuse, etc. Le projet de Costa coïncide également avec l’aboutissement des réflexions de Georges Henri Rivière sur le concept d’écomusée.

     

     

    M.

    Cette exposition est enfin le fruit d’une collaboration entre deux musées en région…

     

     

    M.C.C.

    et

    J.M.G.

    Nous nous réjouissons que le Centre Pompidou-Metz et le Mucem aient su joindre leurs forces autour de ce projet. Les collections du Mucem témoignent indéniablement de l’activité des premiers folkloristes, et il est précieux de confronter la réalité de l’institution actuelle au passé de la discipline. Elles permettent aussi de refléter un certain ancrage régional, qui fait partie de l’ADN des deux institutions, qui les réunit, et prend un sens particulier avec une telle exposition : l’une est établie en Lorraine, mais aussi au cœur de l’Europe, l’autre en Provence, mais aussi au cœur de la Méditerranée. Le Centre Pompidou-Metz, s’il ne possède pas de collections, travaille très étroitement avec celles du Musée national d’art moderne, dont les formidables fonds d’ateliers, tels ceux de Vassili Kandinsky ou de Constantin Brancusi, témoignent de l’attrait de ces artistes pour l’art populaire et le folklore, et dont la richesse a permis de mener cette enquête depuis les prémices de l’art moderne jusqu’à aujourd’hui.
     

     

     

Vassily Kandinsky, Lied [Chant], 1906, tempera sur carton glacé, 49 x 66 cm. Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris, Legs de Nina Kandinsky, 1981 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Vassily Kandinsky, Lied [Chant], 1906, tempera sur carton glacé, 49 x 66 cm. Centre Pompidou, musée national d’Art moderne, Paris, Legs de Nina Kandinsky, 1981 © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Georges Meguerditchian
Július Koller, Univerzálny Folkloristický Obyčaj (U.F.O.) – Čičmany [Coutume folklorique universelle (U.F.O.) – Čičmany)], 1978, épreuve photographique. Slovenská národná galéria, Bratislava © Julius Koller / Slovak National Gallery
Július Koller, Univerzálny Folkloristický Obyčaj (U.F.O.) – Čičmany [Coutume folklorique universelle (U.F.O.) – Čičmany)], 1978, épreuve photographique. Slovenská národná galéria, Bratislava © Julius Koller / Slovak National Gallery