Livre - Comment devient-on tortionnaire ?

363 SIR

Description

Livre

La Découverte

Sironi Françoise

Presentation materielle : 1 vol. (766 p.)

Dimensions : 24 cm

" On ne nait pas auteur de crime contre l'humanité, on le devient. " Mais comment " entrer dans la tête des bourreaux " ? C'est l'objet de ce livre dans lequel Françoise Sironi met en œuvre une nomenclature précise et éprouvée pour rendre compte du système psychique, politique et social qui accouche de bourreaux. On est d'abord submergé d'épouvante. Duch, chef du camp S-21 au Cambodge à l'époque des Khmers rouges, est responsable de la torture et de la mort dans des conditions atroces de plus de 13 000 personnes. Et pourtant, il faut aller au-delà de la sidération pour comprendre ce qui s'est joué entre un individu ne souffrant d'aucune pathologie mentale et un régime responsable de la mort de deux millions de personnes sur une population totale de sept. C'est le travail auquel s'est livré Françoise Sironi, chargée de l'expertise psychologique de Duch au cours de son procès à Phnom Penh. Depuis vingt-cinq ans, elle soigne des patients victimes de tortures, de massacres, de déportations forcées, de crimes de masse. Mais il ne suffit pas de prendre en charge les victimes, il faut aussi comprendre la fabrication des bourreaux, " entrer dans leur tête ". Comment sont-ils devenus des êtres " désempathiques ", déshumanisés, capables du pire ? Pour cela, la psychologie doit se réinventer, se situer à l'intersection de la vie psychique et de la géopolitique. Les Khmers rouges avaient créé l'Angkar, une organisation mystérieuse que chacun devait servir et que l'on nourrissait de sacrifices humains. C'était un " système perpétuel ", une théopathie sacrificielle s'épurant en permanence. Pour déconstruire la mécanique d'un système à la fois psychique, politique et social, Françoise Sironi, grâce aux ressources de la psychologie géopolitique clinique, de l'ethnopsychiatrie et de la schizo-analyse, aux travaux d'Hannah Arendt, de Georges Devereux, Tobie Nathan ou Gilles Deleuze et Félix Guattari, nous donne de nouveaux outils non seulement pour comprendre comment l'impensable...

INTRODUCTION. DÉCONSTRUIRE LA FABRICATION DU BOURREAU, p. 7 La dimension géopolitique au cœur de la subjectivité, p. 12 « Avons-nous besoin des psychologues ? », p. 14 « Une théorie, c’est exactement comme une boîte à outils », p. 15 Naissance de la psychologie géopolitique clinique, p. 18 Pourquoi « géopolitique » et pourquoi « clinique » ?, p. 21 Émotions politiques et émotions géopolitiques, p. 23 Rhizomes, agencements et devenirs, p. 25 De l’ethnopsychiatrie, p. 27 … à la psychologie géopolitique clinique, p. 29 Les limites du complémentarisme, p. 31 La dimension intégrative de la psychologie géopolitique clinique, p. 36 La multiplicité non fusionnante, p. 39 La pensée complexe, p. 40 Bijections et noces deleuziennes, p. 42 Le contre-transfert, outil de perception, p. 43 Mettre à jour la violence subie par les auteurs de violences, p. 49 La vie psychique de la pensée, p. 49 Les deux lignes de vie, p. 50 Les thèmes abordés avec les accusés, p. 51 L’exploration de la sexualité de l’accusé est-elle nécessaire ?, p. 54 L’analyse multifactorielle, p. 55 La dimension thérapeutique de l’expertise psychologique, p. 59 Le tournage d’un documentaire sur l’accusé pendant le procès peut influencer ses réactions psychologiques, p. 61 Questionner la fiabilité des sources documentaires utilisées par les chercheurs, p. 65 PREMIÈRE PARTIE LE PARCOURS DE VIE D’UN AUTEUR DE CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ 1. FACE-A-FACE AVEC L’ACCUSE, p. 77 2. ON NE NAIT PAS TORTIONNAIRE. ENFANCE ET JEUNESSE, p. 85 Se protéger en changeant de nom, p. 85 De Kaing Cheav à Yim Cheav, p. 87 Kaing Guek Eav alias Duch, p. 89 Hang Pin, en Chine, p. 90 « Changer de nom est une bonne chose… », p. 91 Duch enfant, p. 95 Émergence des affects-pensées, p. 100 Une deuxième naissance, p. 102 Initiation au stoïcisme, p. 104 La frayeur culturelle, p. 106 Son Sen, mentor et initiateur politique, p. 106 La dette morale et la réparation, p. 108 L’engagement communiste, p. 110 La passion pour la raison, p. 116 3. TORTIONNAIRE EN CHEF A M13 ET S-21, p. 120 Duch à M 13. Le devenir désempathique, p. 124 La théorie de l’enfant glaise, p. 124 Les réunions de vie, p. 127 La délation, p. 129 Duch, décrit par d’autres, p. 131 « J’avais des compétences en matière d’interrogatoire », p. 134 Une machine de torture et de mort, p. 135 « Écraser », p. 146 Zèle, besoin de reconnaissance et peur de la mort, p. 155 L’édification d’un système perpétuel, p. 167 La paranoïa du fondateur qui fait advenir une entité, p. 169 L’Angkar est un égrégore, p. 171 Le « plan final », également appelé « plan ultime » ou « dernier plan conjoint, p. 176 4. DE LA CHANCE AU BORN AGAIN, p. 180 La fin du régime khmer rouge et de S-21, p. 182 Une période dépressive nourrie de désempathie persistante, p. 187 « Je rumine », p. 188 Son séjour en Chine (1986‑1989), p. 189 La Realpolitik, p. 190 Prise de distance, p. 191 L’assassinat de son épouse en 1995 et sa conversion au christianisme en 1996, p. 192 Duch, born again, p. 195 La religion chrétienne, nouvel exosquelette, p. 196 Arrêté après vingt ans de camouflage, p. 199 Pourquoi Duch n’a-t‑il pas résisté ?, p. 200 De bons frères, maris et pères, p. 202 Les remords et son espoir d’acquittement, p. 205 « J’ai des regrets, des remords par rapport à ce que j’ai fait », p. 207 L’énigme de la volte-face finale, p. 208 DEUXIÈME PARTIE. DE QUOI EST FAIT UN TORTIONNAIRE EN CHEF ? 5. LE RENONCEMENT A UNE IDENTITÉ SINGULIÈRE, p. 219 Un vécu d’anéantissement et d’annihilation, p. 220 Marquages somato-psychiques précoces, p. 221 Du dénoyautage du sujet à l’exosquelette, p. 225 Du vécu d’impuissance à la toute-puissance et à la réparation, p. 227 De l’incapacité à être seul au faux-self, p. 229 Meurtre (ou agonie) psychique et renoncement à l’identité, p. 231 L’attribution d’identité par une instance collective, p. 233 L’exosquelette et l’être nouveau, p. 235 Un métis culturel par acculturation géopolitique et par mutation sociale, p. 237 La vie psychique de la pensée, p. 238 6. LE FAÇONNAGE PAR LE STOÏCISME ET LE CYNISME, p. 245 Stoïcisme et archéologie de soi, p. 247 La mission divine comme épreuve de soi, p. 248 Les limites du principe de souveraineté chez Duch, p. 251 Ce que penser veut dire pour le stoïcien ou le cynique, p. 252 Du stoïcisme au christianisme, p. 253 7. LA DESEMPATHIE, p. 257 Genèse de la désempathie chez Duch, p. 262 Pensée opératoire et alexithymie, p. 265 Du rapport entre stoïcisme, alexithymie et désempathie, p. 266 La haine n’est pas nécessaire pour devenir un auteur de crimes contre l’humanité, p. 273 Désempathie et télescopage de l’identité, p. 275 Pour que tuer devienne facile, p. 277 Comment sortir de la désempathie ?, p. 283 8. LA FONCTION DU CLIVAGE, p. 285 Mécanismes de défense et mécanismes d’adaptation, p. 285 Le fonctionnement du clivage, p. 286 Clivage et engourdissement psychique, p. 288 Dédoublement du moi ou noyaux psychiques clivés ?, p. 288 Le changement de conscience morale, p. 290 L’identité collective de S-21, p. 292 L’échec du clivage, p. 294 Répétition d’une même figure : du clivage à la demande de punition, p. 296 Évolution lente vers une tentative d’unification des différentes parties de soi, p. 298 9. LE DÉNI, p. 300 Déni, mensonge politique et négationnisme, p. 301 Y a-t‑il un lien entre la levée du déni et l’aveu ?, p. 303 La genèse du déni dans le parcours de vie de Duch, p. 304 Déni, contre-transfert et déshumanisation, p. 306 10. LA DENEGATION, p. 312 Les manifestations de la dénégation chez Duch, p. 313 Une plongée dans l’analyse du discours, p. 315 Généralisation du triptyque « clivage-déni-dénégation » en criminalité politique, p. 323 11. AUTRES MÉCANISMES DE DÉFENSE ET D’ADAPTATION, p. 327 Une organisation obsessionnelle de l’existence, p. 327 Les limites de la notion de « structure de personnalité », p. 329 Fonctionnement obsessionnel et impact sur ses rêves, p. 330 Analogies entre Duch et Klaus Barbie, p. 332 La projection identificatoire. Point commun entre Duch et Pascal Simbikangwa, p. 333 La somatisation, p. 339 Le retournement en son contraire et l’annulation, p. 340 La rationalisation, l’évitement et le déplacement, p. 340 La répression et le refoulement, p. 343 Des traits schizoïdes, p. 345 12. UNE ORGANISATION TRAUMATIQUE DE L’EXISTENCE, p. 348 Acculturation et déculturation traumatiques, p. 348 Les différentes manifestations d’un traumatisme collectif, p. 352 Égrégore, p. 356 « Elle avait l’âme au bout des cheveux », p. 357 13. DE L’OBÉISSANCE A LA SERVITUDE DITE VOLONTAIRE, p. 360 L’obéissance primaire, p. 363 L’obéissance due, p. 366 L’obéissance acceptée, p. 372 Le zèle et la peur, p. 375 La servitude dite volontaire, p. 376 La difficile désidentification avec les modèles éducatifs autoritaires, p. 378 Identification à l’effrayeur et processus d’intériorisation complète, p. 381 Position sacrificielle du tortionnaire, p. 384 Le poids du facteur culturel et géopolitique, p. 386 L’importance de la relation de patronage et de népotisme dans la culture cambodgienne, p. 390 Instrumentalisation du rôle de la religion bouddhiste, p. 394 La résistance psychique à l’obéissance, p. 396 Pourquoi l’argument de l’obéissance aux ordres est-il utilisé pour « justifier » le fait d’avoir commis des crimes contre l’humanité ?, p. 398 La fusion totalisante, p. 401 Duch, Eichmann et Barbie, p. 405 Arracheurs de secrets, p. 409 14. HONTE, REMORDS ET ABSENCE DE SENTIMENT DE CULPABILITÉ, p. 412 La honte, p. 412 Perdre la face, p. 419 Les remords, p. 423 Le rôle délétère du clivage, p. 427 La manifestation déplacée des remords, p. 428 Comment s’organise l’évitement du sentiment de culpabilité ?, p. 431 Une pathologie de la pensée, p. 434 Du remords à l’éprouvé possible du sentiment de culpabilité, p. 437 La demande de pardon, p. 439 Séparer le monde des vivants et des morts, p. 441 Confusion chez Duch entre dispositif religieux et dispositif laïc, p. 446 15. CONSCIENCE DE SES ACTES ET RESPONSABILITÉ INDIVIDUELLE, p. 450 La reconnaissance de ses actes par l’accusé en débat au cours de son procès, p. 450 Qu’est-il arrivé à sa conscience ?, p. 453 Responsabilité individuelle versus responsabilité collective, p. 455 Que signifie du point de vue psychologique la reconnaissance de ses actes ?, p. 463 L’apport des neurosciences, p. 464 Le transfert de conscience, p. 466 La difficile adaptation au monde de la justice pénale internationale, p. 468 La réparation, p. 471 L’accès à la conscience intégrée, p. 474 16. L’ÉVOLUTION PSYCHOLOGIQUE DE DUCH, p. 477 Reviviscence de la peur de la mort, p. 478 Le corps parle, p. 481 Analyse de la production onirique, p. 482 Le rêve de la pastèque, p. 486 Apprentissage émotionnel et décloisonnement psychique, p. 493 Déconstruction progressive de la fabrication khmère rouge intériorisée, p. 498 Évolutions diversifiées, p. 501 À qui demander pardon ?, p. 504 Effets de la synergie des mondes sur Duch, p. 508 Sortie progressive du déni et du clivage grâce à la procédure juridique, p. 510 TROISIÈME PARTIE. UN HOMME-SYSTEME 17. COMMENT FONCTIONNE UN HOMME-SYSTEME ?, p. 531 Le renoncement à l’identité singulière, p. 532 La fabrication et l’instrumentalisation, p. 533 Inconscient géopolitique et désordre type, p. 535 Une co-construction des émotions politiques, p. 536 « Il n’aurait pas volé une goutte de jus de palmier… », p. 537 Le reformatage de la pensée, p. 540 Devenir dépendant du jugement de l’autre, p. 542 L’hyperadaptation pour rester tel qu’un autre vous a pensé, p. 543 L’homme-système à l’époque khmère rouge, p. 545 Utilisation de techniques traumatiques, p. 547 Acculturation et déculturation, p. 549 Intériorisation de la raison irrationnelle, p. 553 La perversité induite, p. 556 18. PSYCHOPATHOLOGIE INDUITE PAR LES SYSTÈMES CRIMINOGÈNES, p. 567 La psychopathologie des fondateurs et des dirigeants, p. 568 Le rôle de l’inconscient et des émotions géopolitiques, p. 571 Les traumatismes intentionnels, p. 572 Les paranoïas politiquement induites, p. 573 Les schizophrénies et états schizoïdes politiquement induits, p. 576 Les dépressions existentielles, p. 578 Les troubles psychosomatiques, p. 579 Les conduites obsessionnelles politiquement induites, p. 580 La normose ou psychopathologie de la normativité, p. 581 QUATRIÈME PARTIE. UNE THEOPATHIE SACRIFICIELLE 19. ANGKAR : UNE ENTITÉ QUI VIENT SE LOGER AU CŒUR DES HUMAINS QUI LA SERVENT, p. 591 Est-ce une personne ? Une chose ? Une force ?, p. 592 Intentionnalité humaine et intentionnalité non humaine, p. 594 Un palimpseste idéologique, p. 597 L’Angkar, un organisateur non humain, p. 600 Un modèle biopsychosocial, p. 605 Les exigences de l’entité « Angkar », p. 607 Racines historiques et culturelles, p. 612 L’enracinement du communisme dans le nationalisme khmer, p. 618 Fiction géopolitique d’une fondation, p. 625 20. LES MOYENS POUR FAIRE ADVENIR L’ENTITÉ, p. 631 L’idéologie khmère rouge, p. 631 Idéologie et déculturation, p. 633 Le gouvernement de soi et des autres, p. 635 La transformation du « cru » en « cuit », p. 637 La vengeance disproportionnée, p. 640 Les sacrifices humains, p. 641 Le tortionnaire et le « thérapeute », p. 642 Le système perpétuel, p. 643 Le sacrifice total ou l’autodestruction, p. 645 La discipline monastique, p. 646 CONCLUSION. SE LIBÉRER DE LA SERVITUDE DITE VOLONTAIRE, p. 655 ANNEXE 1. LA PLACE DE L'EXPERTISE PSYCHOLOGIQUE AU SEIN DE LA JUSTICE PÉNALE INTERNATIONALE, p. 657 ANNEXE 2. Y-A-T-IL DES POINTS COMMUNS ENTRE LES AUTEURS DE CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ ET LES TUEURS EN SÉRIE?, p. 700 ANNEXE 3. LA FABRICATION DE L'HOMME NOUVEAU KHMER ROUGE ET DJIHADISTE, p. 718 BIBLIOGRAPHIE, p. 741 WEBOGRAPHIE, p. 752 FILMS DOCUMENTAIRES, p. 754

Bibliogr. et filmogr. p. [741]-[754]. Notes bibliogr.