© photo Louis Joyeux / Ina
Le Temps des archives
Rue, pouvoir, manifestations
Avec Emmanuel Laurentin et en compagnie de grands témoins, Le Temps des archives rembobine le cours de l’histoire à travers des images et des sons issus du fonds de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina).
Une façon de partir en quête des petites et grandes mythologies des décennies écoulées.
En partenariat avec l’Ina. Avec le soutien de la Société des Amis du Mucem.
- Entretien avec Emmanuel Laurentin, journaliste
-
Le Temps des archives décline cette année une même thématique « Rue, pouvoir, manifestations ». Pourquoi avoir choisi ce thème transversal ?
Emmanuel Laurentin : Nous profitons de différentes dates anniversaires pour explorer diverses façons dont l’espace public a pu être investi dans l’histoire récente : la grève et les manifestations, avec les grands mouvements de 1947-48 ; des manifestations d’un autre genre, avec le putsch d’Alger de 1958 ; et puis la révolte – étudiante, ouvrière, sociale –, avec Mai 68. Ces années en « 8 » sont en effet très riches en « sorties » dans la rue. Et particulièrement à Marseille, où les grèves de 1947 furent plus importantes qu’ailleurs. Tout comme les conséquences de la guerre d’Algérie, qui se sont ici ressenties très fortement… Il s’agit donc, à travers cette thématique, de prendre en compte une histoire nationale de 1947 à 1968, dont il s’agit aussi de mettre en évidence les aspects locaux.
Le Temps des archives se déroule au Mucem depuis 2013 en partenariat avec l’Ina. Qu’est-ce qui fait la particularité de ce cycle de rencontres ?
E.L. : Le Temps des archives, c’est une façon de croiser les préoccupations méditerranéennes du Mucem avec une préoccupation patrimoniale, en valorisant le fonds de l’Institut national de l’audiovisuel (Ina) – qui est un fonds très particulier car il s’agit des archives audiovisuelles de la France, celles de ses chaînes de télévision et de radio. Nous avons des heures et des heures d’enregistrement, que nous sélectionnons selon les thématiques choisies, celles-ci étant très souvent liées à Marseille et à la Méditerranée, sujets de réflexion privilégiés du Mucem.
Ces rencontres mêlent tables rondes et projection de sons et d’images d’archives, analyse historique et témoignages… Une formule originale, qui a fait ses preuves !
E.L. : L’idée, depuis le départ, c’est en effet de mélanger un historien avec un « témoin », c’est-à-dire quelqu’un qui a vécu les événements évoqués lors de la rencontre. Et donc, à chaque fois, nous tentons de mettre en relation le souvenir, la mémoire et le travail de l’historien, avec ce support particulier qu’est le support audiovisuel. C’est ça, le Temps des Archives : un dialogue qui donne de la « chair » à l’histoire, avec quelqu’un qui évoque ses souvenirs, et, de l’autre côté, quelqu’un qui fait le travail scientifique d’analyse des sources, en nous expliquant d’où viennent ces sons ou ces images, dans quel contexte ils ont été réalisés… Ce qui donne parfois lieu à des frictions : témoin et historien peuvent ne pas être d’accord sur l’interprétation des faits, l’un ayant à faire avec la fidélité (à son groupe social, son milieu, etc.), l’autre ayant à faire avec la vérité historique. C’est ce dialogue entre mémoire et histoire, qui fait tout l’intérêt de ces rencontres.